Des excavateurs labourent le lit d'un torrent dans une zone protégée du réseau européen Natura 2000. En Roumanie et dans d'autres pays des Balkans, la frénésie de construction de microcentrales hydroélectriques menace des rivières trésors de biodiversité.
"L'ampleur qu'a prise la construction de microcentrales hydroélectriques, en particulier sur des rivières de montagne dans des zones protégées, constitue une menace majeure pour l'intégrité écologique de ces régions et viole les lois nationales et européennes", viennent de dénoncer 69 organisations de défense de l'environnement dans une lettre au ministre roumain de l'Environnement Laszlo Borbely.
A ce jour, 297 projets prévoyant la construction de 536 microcentrales ont déjà reçu un permis de l'Administration des eaux. La boulimie touche aussi la Bulgarie, la Serbie et le Monténégro, selon le Fonds mondial pour la nature (WWF).
"La destruction de torrents en Roumanie pose un problème à toute l'Europe puisque certains sont inscrits dans le réseau Natura 2000 qui préserve le patrimoine biologique du continent", estime le doyen de la Faculté de sciences naturelles de l'Université écologique de Bucarest, Nicolae Galdean.
Violations des autorisations
Selon des experts cités par National Geographic Roumanie, 10 microcentrales controversées pourraient rapporter près de 10 millions d'euros par an uniquement grâce à ces bonus verts. Dans les monts Fagaras, zone Natura 2000, un investisseur a obtenu les autorisations pour construire sur les torrents Capra, Buda et Otic.
La télévision ProTV a montré des excavateurs dans le lit de ces torrents, en période de reproduction des truites, en violation des autorisations. Mercredi dernier, des journalistes de l'AFP ont également vu des excavateurs à l'oeuvre dans le lit mineur de la rivière Buda et des conduites installées dans le lit modifié.
Conséquences graves
Ceci a de graves conséquences sur les micro-organismes, invertébrés et algues, selon les scientifiques. "Nous n'avons pas le droit de travailler dans le lit mais à certains endroits pas moyen de faire autrement", a reconnu sous couvert d'anonymat un des constructeurs.
Après avoir demandé l'arrêt des travaux devant les caméras de ProTV fin octobre, le chef de la police de l'Environnement, Silvian Ionescu, a ensuite affirmé que les promoteurs étaient dans la légalité. "C'est choquant de voir travailler dans le lit mineur de la rivière. C'est un grave problème pour la biodiversité mais je ne peux rien faire tant que la loi le permet. Il faut modifier la loi", a-t-il déclaré.
Alerté en août, le ministre de l'Environnement a ordonné la semaine dernière la suspension des travaux dans les monts Fagaras "pour vérifications" et annoncé un moratoire de 3 à 4 mois pour les nouveaux permis. Les ONG réclament une interdiction totale dans certaines zones protégées. "Quand on détruit la biodiversité, même avec un million d'euros, on ne peut pas la récupérer", dit M. Galdean. (afp)
10/11/11 02h27
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