Le réchauffement
de l’atmosphère pourrait bien exacerber les caractéristiques de climats
pas forcément réputés pour leur soleil, comme au Royaume-Uni… Si dans
plusieurs régions du globe on s’attend à un accroissement de la
sécheresse, d’autres latitudes devraient à l’inverse subir davantage de
tempêtes, de précipitations et de crues. Décryptage de cette situation
en apparence paradoxale et due aux curieuses rivières atmosphériques.
Les rivières atmosphériques sont
responsables de la formation des tempêtes extratropicales qui peuvent
provoquer de gigantesques crues aux moyennes latitudes. © funnigan67,
Flickr, by nc sa 2.0
Au Royaume-Uni il pleut souvent, mais l’année 2012 a été ponctuée d’inondations franchement sévères. Les dégâts occasionnés par ces catastrophes naturelles
ont coûté 1,6 milliard d’euros au gouvernement. Il semble que ce type
d’événements devrait se renforcer dans les décennies à venir en réponse
aux modifications anthropiques de la composition de l’atmosphère. La météo britannique devrait connaître de plus en plus de précipitations continues et conséquentes.
Plus généralement, ce sont tous les pays se trouvant en moyenne latitude
qui seront probablement concernés. Mais pourquoi ? Non loin de
l’équateur, des rivières atmosphériques se forment. Elles se présentent
comme des courants en basse troposphère, riches en vapeur d’eau et
qui peuvent atteindre 300 km de large pour 1.000 km de longueur.
Transportant l’excès d’énergie accumulée à l’équateur vers les plus
hautes latitudes, ces « rivières » sont responsables de la formation des
tempêtes extratropicales et peuvent provoquer crues et inondations aux moyennes latitudes. En 2010, la Californie avait les pieds sous l’eau car une rivière atmosphérique avait provoqué un véritable déluge, qui apporta en moins de deux jours, près de 250 mm d’eau.
Exemple d'événement de rivière atmosphérique (atmospheric river sur l'image) qui a provoqué d'importantes précipitations sur l'ouest des États-Unis. Les images montrent le taux de vapeur d'eau (integrated water vapor ou IWV en cm) en fonction de la latitude. L'échelle de couleur représente le taux de vapeur d'eau totale entre la surface de l'océan et l'espace. © NOAA
Les rivières atmosphériques ont été définies au
début des années 1990. Elles font l’objet d’un intérêt croissant depuis
l’utilisation des données satellite, qui permettent d’identifier clairement les tubes riches en vapeur d’eau. Dans une étude récemment publiée dans les Environnemental Research Letters,
une équipe de l’université de Reading (Royaume-Uni) suggère que ces
rivières devraient s’intensifier et apporter plus fréquemment de
l’humidité aux moyennes latitudes dans les décennies à venir.
Les gaz à effet de serre en cause
D’après leur étude, l’augmentation de la température
atmosphérique entraînera une augmentation progressive de la pression de
vapeur saturante de l’eau. En d’autres termes, la vapeur d’eau
atmosphérique augmentera, ce qui favorisera donc la formation de
rivières atmosphériques. Les résultats de l’étude tendent à dire que les
changements seront notoires en 2074.
Cinq modèles climatiques issus du projet CMIP-5, et utilisés par le Giec,
convergent vers ces conclusions. Dans un premier temps, l’équipe a
lancé ces modèles sur la période 1980-2005, l’objectif étant d’évaluer
leur capacité à simuler correctement la formation des rivières
atmosphériques. Les cinq modèles ont semble-t-il été concluants au test
de contrôle. Pour déterminer l’évolution temporelle de ces rivières, les
modèles ont été soumis à deux types de scénarios : RCP4.5 et RCP8.5,
qui rendent compte des évolutions potentielles de la quantité de gaz à effet de serre dans l’atmosphère.
Plus d’inondations malgré les vagues de chaleur
Tous les modèles simulent au moins un doublement
dans la formation de rivières atmosphériques pour les décennies à venir.
Le niveau de cohérence entre la fréquence des événements et les émissions de gaz à effet de serre est, toujours d’après l’étude, tout à fait remarquable.
« Le lien entre les rivières atmosphériques et
les inondations est déjà bien établi. Donc, une augmentation de leur
fréquence est susceptible d'entraîner une augmentation du nombre
d'événements de fortes pluies d'hiver et des inondations.
Les rivières atmosphériques plus intenses sont susceptibles de conduire
à des cumuls pluviométriques plus importants, et donc à plus
d'inondations », explique le chercheur David Lavers, auteur de l’étude. Si la vague de chaleur
que connaissent actuellement nombre de pays des latitudes moyennes nous
montre que l’été existe toujours, cette étude vient rappeler que le réchauffement climatique nous réserve bien des changements.
Le 29/07/2013 à 11:25
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