Les deux stations où les mesures ont été effectuées : Alert, au nord du Canada et Zeppelin sur l'île de Svalbard. © Bruno Scala/Futura-Sciences |
Les polluants organiques persistants sont des molécules nocives qui se cachent partout. Même dans les glaces de l'Arctique. Quand elles fondent, à cause du réchauffement climatique, ces molécules reviennent dans l'atmosphère.
Les POP – pour polluants organiques persistants – sont des bombes à retardement. Issues de pesticides ou de l’industrie chimique, ces molécules sont nocives pour les êtres vivants et résistent avec force au temps. Elles se dégradent donc très lentement et ainsi, s’accumulent. Dans l’air, mais aussi dans les tissus. On les retrouve donc à chaque étape de la chaîne alimentaire et également dans nos assiettes. Et comme elles ont aussi la capacité de se disperser à des distances très importantes, elles s’accumulent loin des Hommes, nous laissant croire qu’on s’en est débarrassé.
Doux rêve ! Une équipe de chercheurs canadiens et chinois nous explique que les POP se sont cachés dans les glaces de l’Arctique où les faibles températures facilitent leur déposition. Mais avec la fonte de la glace due au réchauffement climatique, ils sont en train de refaire surface. Ce phénomène n'est pas une première. En 2009, on avait observé un relargage récent de POP dans le lac suisse d'Oberaar suite au recul des glaciers en amont.
Vingt et un POP recensés par l'ONU
Ces POP avaient été au cœur de la convention de Stockholm en 2001, et en 2004 la législation avait été mise en vigueur. Le but était de réduire voire arrêter la production de ces molécules ou en tout cas, d’en contrôler les rejets. Tâche difficile quand on sait que l’un des douze POP recensés par l’ONU est le DDT, un insecticide abondamment utilisé dans la lutte contre le paludisme.
L’équipe de chercheurs emmenée par Jianmin Ma s’est intéressée aux concentrations de ces substances dans l’air, de 1993 à 2009, au niveau de deux stations situées sur l’île norvégienne du Spitzberg et à l’extrême nord du Canada, à la limite des océans Atlantique et Arctique (voir carte ci-dessous). Les résultats de l’étude ont été publiés dimanche dans la revue Nature Climate Change.
En modélisant les évolutions de concentration des POP dans l’atmosphère et en confrontant ces concentrations avec d’autres données atmosphériques, les chercheurs ont pu faire la différence entre ce qui était imputable au changement climatique et ce qui ne l’était pas.
Des efforts éclipsés
Alors que les concentrations atmosphériques de POP avaient diminué grâce aux actions politiques visant à en réduire ou en interdire l’usage, le réchauffement climatique est à l’origine de la libération des molécules de POP dans l’atmosphère depuis une vingtaine d’années, selon les résultats de l’étude. Ou comment les erreurs de nos grands-parents ont déjà un impact sur notre environnement et notre santé.
L’autre intérêt de cette étude est de montrer que les efforts que nous avons faits ces dernières années afin de limiter les émissions de POP dans l’atmosphère ne sont pas inutiles. Pour l’instant, ces efforts ne sont pas récompensés car leur produit est en grande partie dissimulé par les conséquences du réchauffement climatique.
Par Bruno Scala, Futura-Sciences
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