lundi 31 octobre 2011
Des moustiques génétiquement modifiés pour tuer leur progéniture
Des chercheurs ont publié dimanche les premiers signes de succès d'un lâcher dans la nature de moustiques génétiquement modifiés pour tuer leur progéniture. Ces expérimentations pourraient permettre de lutter contre des maladies transmises par des insectes, comme la dengue et le paludisme, et être utilisées dans le domaine agricole pour lutter contre les parasites.
Le New York Times rapporte que ces recherches pourraient provoquer un débat public similaire à celui qui touche les OGM dans les cultures agricoles, car une fois sortis des laboratoires, ces moustiques refaçonnés ne peuvent plus être retirés de l'environnement. Certains scientifiques critiquent ainsi la société anglaise responsable de ces recherches, Oxitec, pour avoir lancé trop vite ses expériences de terrain, parfois dans des pays disposant de peu de régulations en la matière.
“Même si elle ne provoque pas de dommage, [sa précipitation] diminuera la crédibilité et la légitimité de cette entreprise scientifique" dit au New York Times Lawrence O. Gostin, professeur de droit international de la santé à l'université Georgetown aux Etats-Unis.
Le premier lâcher de moustiques d'Oxitec, une firme créée en 2002 par un chercheur de l'université d'Oxford, Luke Alphey, avec des soutiens de l'université et des investisseurs privés, a eu lieu dans les îles Caïmans, dans les Caraïbes, en 2009, et a pris la communauté scientifique par surprise. Un article publié dimanche dans le journal Nature Biotechnology rend compte de cette expérience, qui a été suivie depuis par des lâchers en Malaisie et au Brésil.
Oxitec a modifié un moustique Aedes aegypti, en le dotant d'un gène qui provoque sa mort à moins que ne lui soit administré de la tétracycline, un antibiotique commun. Aedes aegypti peut ainsi être élevé pendant plusieurs générations en laboratoire, sous antibiotiques. Il se développe suffisamment pour pouvoir se reproduire une fois lâché dans la nature, mais alors sa progéniture, privée d'antibiotiques, mourra avant d'avoir atteint le stade adulte.
Les chercheurs se sont concentrés sur la dengue, puisqu'une seule espèce de moustique en est le principal vecteur, alors que le paludisme est transmis par un grand nombre d'insectes. De plus, il n'existe pas de médicament traitant la dengue, et les moustiquaires sont inefficaces contre Aedes aegypti, qui pique durant le jour. Le New York Times rappelle que la dengue fait quelque 25 000 morts chaque année, et entre 50 et 100 millions d'infections. Cette maladie se manifeste par des symptômes sévères de grippe.
Un lâcher de moustiques génétiquement modifiés dans la nature pourrait permettre, selon ses promoteurs, de réduire la population locale relativement rapidement, sans recourir à des pesticides. Ainsi, selon les chercheurs, les quelques 19 000 mâles relâchés en 2009, pendant quatre semaines, sur 10 hectares de l'île Grand Caïman, représentaient 16 % de la population mâle totale et ont été à l'origine de 10 % des larves. Ceci indiquerait qu'ils sont suffisamment compétitifs pour peser sur la fertilité générale de la population.
Parmi ceux qui ont critiqué le projet, Todd Shelly, un entomologiste du ministère de l'agriculture à Hawaï, note dans un commentaire publié avec l'article de la revue Nature Biotechnology que 3,5 % des insectes nés de ces amours génétiquement modifiées, dans un test en laboratoire, survivaient jusqu'à l'âge adulte bien qu'ils soient porteurs du gène létal.
Le monde
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