lundi 31 octobre 2011

Le Cern à l'aube d'une nouvelle physique



La crise est partout en Europe, le moral est en berne, l’hiver arrive… Pas au Cern. Enfin, l’hiver, si, quand même. Reste que depuis le début de l’année 2011, les chercheurs sont particulièrement « excités ». Ils sont à l’aube de découvertes qui vont faire entrer la physique dans une nouvelle ère. Et ce grâce aux performances exceptionnelles du LHC, le plus grand accélérateur de particules du monde.

Depuis le début 2011, les collisions à la quasi-vitesse de la lumière entre les particules (plus petits éléments de la matière) produisent un volume de données exceptionnel. « D’ici à la fin de l’année, nous en aurons cinq fois plus que ce qui était initialement prévu » explique le chercheur Bruno Mansoulié du CEA (Commissariat à l’Énergie Atomique), qui travaille à l’expérience Atlas. Plus, il y a de données, plus les scientifiques ont des chances de trouver la particule star en physique : le Boson de Higgs. Celle qui fait que la matière a acquis une masse plutôt que rien.
Supposée de façon théorique par ce physicien écossais en 1964, son existence n’a jamais été démontrée, et fait l’objet de toutes les spéculations. Le physicien Leon Lederman l’a même surnommée « la particule de Dieu ». Avec le LHC, l’étau se resserre. Des milliers de chercheurs répartis dans deux expériences, Atlas et CMS, le traquent. « L’idée est que si une expérience trouve quelque chose, l’autre puisse confirmer par une approche complémentaire » note Bruno Mansoulier.

Vers la matière noire

Dénicher ce boson sera important en lui-même, et confirmera le modèle standard admis aujourd’hui, c’est-à-dire notre physique actuelle. Mais l’intérêt va bien au-delà. « Nous sommes convaincus que le Boson de Higgs sera le premier d’une série de découvertes. Il s’agit d’une fenêtre vers une nouvelle physique » explique Guido Tonelli, porte-parole de CMS. La compréhension par l’homme du monde dans lequel on vit en est encore à l’enfance.
« Quand ma fille me demande de quoi est fait l’Univers, je ne peux pas lui dire. La matière que l’on connaît n’en représente que 4 % » poursuit Guido Tonelli. Le Boson de Higgs et ses étranges propriétés pourrait être la clé vers la matière noire, qui représenterait de 20 à 25 % de l’Univers. « On sait qu’elle est là, autour de nous, mais elle échappe à tous nos détecteurs. » Juste un exemple : sans elle, les galaxies n’existeraient pas sous cette forme. De quoi est-elle faite, est donc l’un des mystères qui sera ouvert avec une quasi-certitude fin 2012.
« Si ce boson existe, il pourra très difficilement échapper à la découverte compte tenu du volume de données que l’on aura » confirme Guido Tonelli. « Dans le cas contraire, la porte aura été refermée » dit Bruno Mansoulier. Le modèle standard ne sera donc pas le bon, ce qui ouvre également la voie vers une nouvelle physique. Car les chercheurs en sont convaincus : c’est dans cet infiniment petit que se trouvent les clés de l’infiniment grand, et des forces qui les régissent, aussi vraies les unes que les autres, mais contradictoires entre elles. Un champ de recherches vertigineux, à même de relancer des découvertes scientifiques d’envergure qui se sont largement taries depuis le XXe siècle…

Le Dauphiné

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